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(introduction)

CASTAIGNE, FRANÇOIS
UNIVERSITÉ LAVAL (QUÉBEC)

La plupart des aliments que nous consommons contiennent de 20 à 60% d'eau et ne sont à l'abri des détériorations biochimiques enzymatiques et microbiennes que s'ils sont stérilisés ou congelés. Ces détériorations sont dues à une trop grande «disponibilité>, de l'eau présente dans l'aliment. Cette «disponibilité» de l'eau peut être quantifiée par l'activité de l'eau ou l'aw.

1. Définition de l'activité de l'eau

L'activité de l'eau est égale au rapport de la pression partielle de la vapeur d'eau dans l'aliment sur la pression de vapeur de l'eau pure à la même température que l'aliment, et cette activité de l'eau est égale à l'humidité relative de l'air en équilibre avec l'aliment divisé par cent (Figure 1).


P= pression partielle de la vapeur d'eau dans l'aliment
Pe= pression de vapeur de l'eau pure à la même température
HRE= humidité relative d'équilibre en %

Comme P. la pression partielle de la vapeur d'eau dans l'aliment est inférieure ou égale à la pression de vapeur de l'eau pure à la même température, l'activité de l'eau est comprise entre 0 et 1. Plus l'aw est proche de 1, plus le produit contiendra de l'eau et, inversement, plus l'aw est proche de 0, moins l'aliment contiendra d'eau.

Ainsi, lorsqu'un aliment sec (biscuits) est mis dans un air ayant une humidité relative HR = 60%, celui-ci va prendre de l'eau à l'air pour se mettre en équilibre avec l'air. L'aliment aura alors une activité de l'eau de 0,6.

Inversement, lorsqu'un aliment riche en eau (légume) est mis dans un air ayant une humidité relative HR = 60%, celui-ci va perdre de l'eau (sécher) pour se mettre en équilibre avec l'air. L'aliment aura alors une activité de l'eau de 0,6 (Figure 2).

Il est bien évident que dans un aliment, à chaque aW correspond une teneur en eau fixe. Cependant la relation entre l'activité de l'eau et la teneur en eau n'est pas linéaire et varie avec chaque aliment ou groupe d'aliments. Cette relation s'exprime par l'isotherme de sorption.

2. Les isothermes de sorption

L'isotherme de sorption indique à l'équilibre pour une température déterminée, la quantité d'eau contenue dans l'aliment en fonction de son a w ou de l'humidité relative de l'air en équilibre avec l'aliment. On obtient ces courbes en plaçant un échantillon d'aliment dans une série de contenants fermés hermétiquement (dessiccateur) dans lesquels on maintient une gamme d'humidité relative constante, puis en déterminant à l'équilibre la teneur en eau dans chacun des échantillon d'aliments. Cette gamme d'humidité relative peut être obtenue à partir de solutions salines satinées (Tableau 1). Selon que l'on parte d'un aliment humide ou d'un aliment sec, on obtient une courbe de désorption ou d'adsorption. La figure 3 représente l'une de ces courbes. En ordonnée, nous avons la teneur en eau exprimée en gramme d'eau par 100 grammes de matière sèche et en abscisse l'activité de l'eau.

Cette courbe de sorption peut être divisée en deux régions. Une région (A) où l'eau est sous forme de couche monomoléculaire correspondant à 3 à 10% d'eau dans le produit. Cette eau est fortement liée et l'activité de l'eau est très basse, inférieure à 0,3. Une région où l'eau est soit sous forme de couches multiples, soit condensée dans des capillaires. Cette eau qui est condensée va donc être capable de dissoudre et de transporter des solutés et de participer à des réactions spécifiques.

Au tableau 2, nous présentons pour divers aliments, la teneur en eau maximum correspondant à la couche d'eau monomoléculaire. Cette eau n'étant pas disponible en tant que solvant, le produit sera très stable.

Comme nous l'avons remarqué à la figure 3, l'isotherme de désorption n'est pas superposable à l'isotherme d'absorption; ce phénomène s'appelle hystérésis. Pour une même activité de l'eau, la teneur en eau de l'aliment est plus grande dans le cas de la désorption que dans le cas de l'absorption. Ceci est dû aux phénomènes de condensation et d'évaporation de l'eau dans les capillaires ce qui est représenté à la figure 4. Dans les deux cas, la pression partielle de vapeur d'eau, donc l'activité de l'eau est la même.

2.1 Détermination théorique de la couche d'eau monomoléculaire

Comme nous l'avons vu précédemment, la couche d'eau monomoléculaire est un paramètre important dans la conservation du produit car elle correspond à la quantité d'eau maximum en-dessous de laquelle l'eau n'est pas disponible pour les réactions chimiques et biochimiques.

Le plus intéressant des modèles théoriques est celui proposé par Brunauer, Emmet et Teller (B.E.T.) car il permet de déterminer expérimentalement la teneur en eau correspondant à la courbe d'eau monomoléculaire. Il est donné par l'équation (Figure 5): aw = 1 + aW(C-1)


M = teneur en eau (9/100 9 de matière sèche)
Mo = teneur en eau correspondant à la couche d'eau monomoléculaire (g/100 g de matière sèche)
C = constante

Il est possible de déterminer expérimentalement M o et C à l'aide de valeur de M obtenue à diverses activités de l'eau. Sur le graphique présenté à la figure 5, l'ordonnée à l'origine est égal à Cl/M oC. A partir de ces deux valeurs, il est facile de déterminer M o et C.

Le modèle B.E.T. s'applique bien aux produits alimentaires jusqu'à des valeurs de l'activité de l'eau de 0,5; audessus, le modèle diverge.

2.2 Relation entre isotherme de sorption et entreposage d'un aliment

Les isothermes de sorption permettent de prévoir et de comprendre le comportement d'un aliment lors de l'entreposage. La première information fournie par l'isotherme de sorption c'est l'hygroscopicité d'un aliment. Cette hygroscopicité mesure l'influence qu'aura une variation de l'humidité relative ambiante sur la teneur en eau du produit lorsque celui-ci n'est pas protégé par un emballage étanche.

Sur la figure 6, nous voyons que le saccharose amorphe est beaucoup plus hydroscopique que le saccharose cristallisé à de faible activité de l'eau (a w <0,5), ce qui explique pourquoi il est si difficile de conserver le sucre glace, alors que le saccharose cristallisé se conserve bien.

Lorsqu'un produit, ayant une isotherme de sorption à hystérésis, a été déshydraté à une teneur en eau M, si celuici reprend un peu d'eau parce qu'il est mal entreposé (Figure 7), il passe de l'isotherme de désorption à l'isotherme d'absorption et son activité de l'eau peut augmenter dangereusement.

Pour les variations de température lors de l'entreposage ou du transport, l'effet est surtout important pour les produits sucrés et les produits dont l'activité de l'eau est inférieure à 0,5.

Nous voyons à la figure 8, que lorsqu'un produit est entreposé à une humidité relative en équilibre avec l'aw, HRE=a w x 100, une augmentation de température à T + ”T va entraîner une déshydration du produit qui se remettra en équilibre avec l'air ambiant. En fait la déshydration pourra être supérieure si, comme c'est souvent le cas, l'humidité relative de l'air diminue lorsque la température augmente.

3. Relation entre l'activité de l'eau et la dégradation des aliments

Pour situer les différents aliments et le lien qu'il y a entre leur teneur en eau et l'activité de l'eau, nous pouvons les classer en trois catégories en fonction de leur activité de l'eau (Tableau 5). C'est en fonction de cette activité de l'eau que se produira lors de l'entreposage un certain nombre de dégradation.

Dans cette section, nous allons voir l'influence de l'activité de l'eau sur les réactions de détérioration de type biochimique, enzymatique et microbiologique (Figure 9). Nous observons, à la figure 9, que c'est aux activités de l'eau comprises entre 0,2 et 0,3 que les vitesses de détérioration des aliments sont les plus faibles, ce qui correspond à la couche d'eau monomoléculaire. Ceci montre bien qu'il est important de connaître la teneur en eau d'un aliment correspondant à la couche d'eau monomoléculaire.

3.1 Oxydation des lipides

Nous voyons sur la figure 9 que le rancissement se produit à de très basses et à de moyennes activités de l'eau. Le rancissement est dû à l'action de l'oxygène sur les acides gras non saturés par l'intermédiaire de mécanismes impliquant successivement les radicaux libres, les peroxydes lipidiques et les composés carbonylés. Les réactions produisent des composés volatiles à odeur indésirable, détruisent les vitamines liposolubles et forment des composés toxiques.

Comme ces réactions affectent les produits à faible et à moyen aw qui contiennent des matières grasses, les produits qui sont affectés sont dans le cas des produits à faible a w: les biscuits et dans le cas des produits à a w moyen: les crémages à gâteaux, mayonnaise, beurre, margarine, etc.

Cette oxydation des lipides est très rapide et constitue en général le facteur limitant de la conservation de tels produits. Il faut remarquer que l'action des anti-oxydants tel le BHA, le BHT ou les séquestrants comme l'EDTA est d'autant meilleur que le a w augmente.

3.2 Brunissement nonenzymatique

Le brunissement non-enzymatique provient en général d'une réaction entre un composé à fonction carbonylée tel les oses et un composé aminé tel les protéines (réaction de Maillard). Les réactions aboutissent à la formation de polymères bruns qui sont soit désirables (comme dans les biscuits, la croûte de pain, les pommes de terre frites et les chips), soit indésirables (comme dans le lait déshydraté, les viandes séchées, la farine de poisson et les fruits déshydratés). Ces réactions s'accompagnent d'une baisse de la valeur nutritive de l'aliment.

La vitesse de brunissement augmente rapidement avec le a w pour atteindre un maximum à des a w de l'ordre 0,5 à 0,7. Audessus de ces valeurs le brunissement diminue (facteur de dilution).

Pour favoriser ces réactions de brunissement, on peut agir sur le pH (entre 6 et 8) et mettre en présence des composés capables de réagir ensemble (industrie des amuse-gueule extradés). Pour empêcher ces réactions de brunissement, il faut quand c'est possible abaisser le pH (2,5 à 3,5) et ajouter du SO 2 ou des sulfites.

3.3 Réactions enzymatiques

Les réactions enzymatiques sont étroitement liées à l'activité de l'eau. C'est ainsi que l'on n'observe pas de réaction d'hydrolyse dans la section A des courbes de sorption, c'est-à-dire pour de faibles a w. Par contre, la vitesse d'hydrolyse augmente considérablement au-dessus d'une a w de 0,7. Il en est de même pour beaucoup de réactions enzymatiques (action des glucoses oxydases ou de polyphénols oxydases). Cependant, certains enzymes comme la lipase agissent même à des activités de l'eau très faibles (elle agit même à l'état congelé dans le cas des poissons). Pour empêcher ces réactions enzymatiques, avant de déshydrater ou de congeler un produit, on effectue un blanchiment qui est un traitement thermique destiné à détruire les enzymes. Cependant de tels traitements ne sont guère applicables aux graines. C'est ainsi que le soya, l'arachide et les graines d'oléagineux en général nécessitent un séchage poussé pour ralentir l'action des lipases.

3.4 Croissance des microorganismes

Le développement des microorganismes dans les aliments est lié étroitement à l'activité de l'eau, en raison de l'influence de la pression osmotique qui agit sur les échanges entre les microorganismes et le milieu. On peut dire qu'en général, la valeur optimale pour la croissance des microcrganismes est située entre 0,92 et 0,99. Endessous, la croissance est retardée ou inhibée, ce qui explique la bonne conservation de certains aliments traditionnels, tels la confiture, certains fromages et certaines charcuteries.

Le tableau 4 nous donne une idée des activités de l'eau minimum nécessaire à la croissance des diverses classes de microorganismes. Le tableau 5 nous donne plus en détails ces mêmes renseignements.

Si l'on considère les bactéries responsables de l'empoissonnement alimentaire, on peut dire que pour une a w inférieure à 0,95, les bactéries du genre Shigella, les salmonelles, Echerichia coli et les clostridium responsables de la production de toxines ( botulinum type A, B et C) sont inhibées. Par contre, Staphylococcus aureus dans les conditions aérobies peut pousser jusqu'à une a w de 0,86.

En ce qui concerne les levures, elles sont capables dans le cas des levures osmophiles de se développer jusqu'à des activités de l'eau de 0,65. Elles peuvent croître dans des milieux liquides contenant de 50 à 60% de sucre ou 10 à 15% de NaCl. En général, plus le au sera bas, plus la croissance de ces levures sera inhibée donc plus le temps de conservation sera augmenté.

Comme la plupart du temps, les produits liquides dans lesquels peuvent se développer des levures subissent un traitement thermique; s'il y a développement de levure, cela ne peut provenir que d'une contamination lors de l'utilisation du produit. Lorsqu'on ne fait pas de traitement thermique ou pour éviter les recontaminations, on peut utiliser des agents de conservation tel le SO 2 et ses sels, les acides benzoïque, parabenzoïque et sorbique et leurs sels. Un des problèmes de l'utilisation de ces acides est que leur action n'est vraiment efficace qu'à des pH inférieurs à 4,5.

Les moisissures sont un des problèmes majeurs concernant les produits à humidité intermédiaire car ceux-ci ne subissent aucun traitement thermique (noix, certaines charcuteries, fruits séchés, etc). Comme les moisissures ne se forment qu'en surface, il faut considérer l'activité de l'eau à la surface et non à l'intérieur du produit (cas des gâteaux, des fruits séchés, etc). Pour empêcher le développement des moisissures, on peut conditionner le produit, lorsque c'est possible, dans une atmosphère qui ne contient pas d'oxygène. Dans les autres cas, on peut utiliser des agents de conservation tel les esters de l'acide parahydroxygenzoïque (méthyle, éthyle et butyle parabene) qui sont actifs à tous les pH, tandis que les autres, comme les acides benzoïque, pripionique et sorbique et leurs sels ne sont actifs qu'à des pH inférieures à 5.

4. Comment baisser l'activité de l'eau d'un aliment

Pour conserver les aliments, traditionnellement nos ancêtres les séchaient au soleil, comme les raisins, les dattes, etc. On les concentrait et ajoutait du sucre comme dans les confitures ou du sel comme pour le poisson salé-séché ou dans le beurre salé. Maintenant ces opérations sont faites de manière industrielle. Ainsi la déshydratation est appliquée à grande échelle pour produire des laits écrémés ou entiers en poudre, des fruits séchés, des légumes déshydratés, des purées de pomme de terre, etc.

Ces produits, une fois déshydratés, ont une activité de l'eau suffisamment basse pour qu'ils se conservent sans détérioration biochimique, enzymatique ou microbiologique.

La concentration est largement utilisée dans le domaine des jus, du lait, des confitures avec addition de sucre dans certains cas ou de sel dans le cas de soupes concentrées ou de concentré d'oeuf. Le but de la concentration et de l'addition de sucre ou de sel est d'abaisser l'activité de l'eau. Cependant ceci n'est pas suffisant pour une conservation à long terme et l'on doit associer à cette opération un traitement à la chaleur pour stabiliser le produit.

La congélation est une technologie dont l'application est plus récente que le séchage et la concentration et qui en transformant l'eau en glace abaisse l'activité de l'eau. De plus, en abaissant la température, elle diminue les vitesses de réaction, ce qui augmente encore l'effet de la baisse d'activité de l'eau.

Comme nous pouvons le constater au tableau 6, les microorganismes peuvent se développer dans l'eau pure jusqu'à une température de -10°C, qui correspond à une a w de 0,91. Il est bien évident que dans un aliment qui contient au départ des substances solubles dans l'eau (sel, sucre), l'activité de l'eau à la même température sera inférieure.

5. Les produits à humidité intermédiaire

Nous connaissons bien les produits à humidité intermédiaire traditionnels tels les confitures, le miel, la charcuterie, les pâtisseries dont l'activité de l'eau est comprise en 0,6 et 0,9. Depuis quelques années, un certain nombre de produits nouveaux ont été créés dans cette catégorie d'aliments. C'est d'abord dans le domaine des aliments pour chien et chat que ces produits se sont développés, puis dans le domaine de la pâtisserie industrielle ainsi que dans les barres nutritives qui connaissent un bon succès auprès des consommateurs.

Deux procédés sont utilisés pour fabriquer de tels aliments:

- le procédé dit d'infusion humide qui consiste à tremper des aliments dans des solutions de sucre ou de sel dans le but d'abaisser leur activité de l'eau;

- le procédé dit de mélange qui consiste à mélanger divers composés ensemble de façon à obtenir un aliment ayant l'acti vité de l'eau désirée.

Le premier procédé est connu sous le nom de déshydratation par osmose et consiste à tremper des fruits coupés en tranche dans des solutions de sucre ou des légumes dans des solutions de sel à diverses températures et diverses concentrations de manière à diminuer l'activité de l'eau. Au tableau 7, nous donnons l'activité de l'eau de solution saturée de sel, de glucose et de saccharose à 20°C.

Comme nous le représentons à la figure 10, lorsque l'on trempe un aliment comme un fruit ou un légume dans une solution de sucre ou de sel, de l'eau va sortir par osmose du produit et du sucre ou du sel va pénétrer dans le produit. Le procédé est appliqué avec succès aux fruits tels les pêches, poires, bananes, pommes, mangues, ananas, etc. En 4 à 8 heures, il est possible d'enlever 50% d'eau à des fruits coupés en tranche.

Le deuxième procédé dit de mélange est surtout utilisé dans la préparation d'aliment pour chien et chat, dans le domaine de la pâtisserie industrielle, de la charcuterie et des aliments composés. Pour ajuster la formulation à une activité de l'eau désirée ou pour déterminer l'activité de l'eau d'un produit, on peut utiliser la méthode dite «d'équivalent saccharose». Au tableau 8, nous donnons la liste des équivalents saccharose de produits utilisés dans l'industrie des gâteaux et de la confiserie. Ainsi, la concentration en équivalents saccharose (ES) exprimée en gramme de sucre par gramme d'eau est donné par la relation (Tableau 9).


ki= équivalent saccharose des ingrédients I
ai= masse d'ingrédient I
Mo= masse d'eau dans la formulation
Mp= masse d'eau perdue lors de la cuisson

L'activité de l'eau est obtenue à l'aide du tableau 10 qui donne la correspondance concentration en équivalent saccharose-activité de l'eau.

Au tableau 11, nous présentons une recette de gâteau avec deux formulations différentes afin de comparer les activités de l'eau. Nous voyons que la formulation 2 a une activité de l'eau plus basse que la formulation 1, ce qui lui donnera un temps de conservation plus long.

6. Mesure de l'activité de l'eau d'un aliment

Jusqu'ici nous avons vu l'importance de l'a w d'un aliment, comment la calculer et comment l'utiliser. Il est bien évident que quelle que soit la méthode de calcul utilisée pour prévoir une a w, il vaut mieux la vérifier par une mesure expérimentale.

En général, on ne peut pas mesurer directement l'aw d'un aliment. Par contre, on peut mesurer l'humidité relative d'équilibre (ERH). Cette mesure est basée sur le fait qu'un aliment ou un morceau d'aliment placé dans un espace restreint va au bout d'un certain temps se mettre en équilibre avec l'air dans cet espace (Figure 11). Ainsi on va avoir égalité entre l'humidité relative de l'air compris dans cet espace restreint et l'activité de l'eau dans le produit. Il suffit que cet air soit en contact avec un élément sensible qui mesure la pression partielle de vapeur d'eau dans l'air pour obtenir la mesure de l'humidité relative d'équilibre.

Nous avons vu ici l'importance de l'activité de l'eau sur la conservation des aliments, tant du point de vue biochimique que microbiologique. Je n'ai pas parlé de l'influence de l'a w sur la texture des aliments qui va affecter les biscuits en les ramollissant ou des poudres en favorisant les phénomènes d'agglomération. En effet ces problèmes sont liés à l'emballage des produits et concernent principalement les produits à faible humidité. Ce serait en lui-même un sujet complet à traiter.

Tableaux

Tableau 1. Activité de l'eau pour certaines solutions salines saturées

Solution de sel saturé

°C

aw

LiCl H 2O

20

0,14

KC2H3O2

20

0,21

MgCl2.6H2O

20

0,33

KCO3

20

0,44

Mg(NO3)2 6H 2O

20

0,52

NaCl

20

0,76

(NH4)2SO4

20

0,81

Li2SO4

20

0,85

K2CrO4

20

0,88

KNO3

20

0,94

Na2HPO4

20

0,96

K2SO4

20

0,97

Labuza, T.P.; Acott, K.; Tatini, S.R.; Lee, R.Y.; Flink, J. et McCall, W. 1976. Water activity détermination: a collaborative study of different method. Journal of Food Science, Vol. 41:910.

Tableau 2. Teneur en eau maximum correspondant à la couche d'eau monomoléculaire dans l'aliment

Produits

pourcentage d'eau %

Biscuits

4

Lait écrémé en poudre

6

Viande de boeuf déshydratée

6

Pomme de terre déshydratée

7

Haricots verts déshydratés

6

Oignons déshydratés

4

Tableau 3. Classement des aliments en fonction de l'activité de l'eau

Les aliments à haute humidité (HMF) 0,9 <a w < 1

Fruits


Jus de fruits


Légumes


Oeufs

aw = 0,97

Viande


Beurre


Margarine


Fromage


Pain

aw = 0,96

Saucisson sec


Gâteau éponge


Les aliments à humidité intermédiaire traditionnelle (IMF) 0,6 < a w <0,9

Confiture

aw =

0,82 à 0,9

Fruits séchés


0,72 à 0,8

Miel


0,75

Sirop d'érable


0,70

Remplissage à tarte


0,65 à 0,71

Salami


0,82 à 0,85

Pâtisserie industrielle


0,70 à 0,90

Les aliments à faible humidité (LMF) a w < 0,6

Pâtes alimentaires

0,5

Épices

0,5

Oeuf en poudre

0,4

Biscuit

0,3

Lait en poudre

0,2

Légumes déshydratés

0,2

Tableau 4. A w minimum permettant la croissance des microorganismes

Bactéries

0.91

Levures

0.88

Moisissures

0.80

Bactéries halophiles

0.75

Moisissures xérophiles

0.65

Levures osmophiles

0.60

Scott, W.J. 1957. Water relation of food spoilage microorganisms. Advance In Food Research 7, 83.

Tableau 5. A w minimum permettant la croissance des microorganismes (nom de ces organismes et a w correspondante)

aw

Bactérie

Levures

Moisissures

0,98

Clostridium (1), Pseudomonas a

-

-

0,97

Clostridium (2)

-

-

0,96

Flavobacterium, Klebsiella, Lactobacillus a, Proteus a, Pseudomonas a, Shigella

-

-

0,95

Alcaligenes, Bacillus, Citrobacter, Clostridium (3), Enterobacter, Escherichia, Proteus, Pseudomonas, Salmonella, Serratia, Vibrio

-

-

0,94

Lactobacillus, Microbacterium, Pediococcus, Streptococcus a, Vibrio a

-

-

0,93

Lactobacillusa, Streptococcus

-

Rhizopus Mucor

0,92

-

Rhodotorula Pichia


0,91

Corynebacterium, Staphylococcus (4), Streptococcus a



0,90

Lactobacillusa, Micrococcus, Pediococcus, Vibrio a

Hansenula, Saccharomyces,

Cladosporium

0,88


Candida Debaryomyces, Hanseniaspora, Torulopsis

Cladosporium

0,87


Debaryomycesa

-

0,86

Staphylococcus (5)

-

-

0,80

-

Saccharomycesa

Paecilomyces




Aspergillus,




Penicillium,

0,75

Halophilic bacteria

-

Emiricella,
Eremascus

0,70

-

-

Aspergillusa


-

-

Wallemia

0,62

-

Saccharomycesa

Eurotium
Chrysosporium
Eurotiuma
Monascus

aCertaines souches; (1) = Clostridium botulinum type C; (2) = C1. botulium type E et certaines souches de Cl.. perfringens; (3) = Cl. botulinum type A et B et Cl. perfringens; (4) = anaérobie; (5) = aérobie.

Leistner, L. et Rodel, W. 1976. The stability of intermediate moisture foods with respect to microorganisms in intermediate moisture foods, edited by R. Davies, G.G. Birch and K.J. Parker, Applied Science publishers Ltd, London, p. 120.

Tableau 6. Activité de l'eau de la glace à diverses températures

Température

aw

0

1

-5

0,95

-10

0,91

-15

0,86

-20

0,82

-25

0,78

-30

0,75

-40

0,68

-50

0,62

Tableau 7. Activité de l'eau de diverses solutions saturées à 20°C


% P/P

aw

glucose

47

0,92

saccharose

67

0,86

NaCI

26

0,75

Tableau 8. Équivalent saccharose de produits utilisés dans l'industrie de la pâtisserie et de la confiserie

Farine

0,2

Gras

0,0

Lait écrémé en poudre

1,2

Poudre à pâte

3,0

Sel

11,0

Acide citrique et tartrique

3,0

Sirop de glucose 42 DE

0,7

Sirop de glucose 64 DE

0,9

Dextrose

1,4

Sorbitol

2,0

Glycérol

4,0

Gomme arabique, pectine, amidon et autres colloïdes gélifiant

0,8 max.

Gélatine, caséine

1,3

Sucre inverti

1,3

Seiler, D.A.L. 1969. Equilibrium relative humidity of baked products with particular reference of shelf life of cake. In The British Food Manufacturing Industries Research Association. Relative humidity in the food industry 196. Proceeding of a symposium held in London (16th September 1969, no 4, November 1969, p.28).

Tableau 9. Calcul de la concentration en équivalent saccharose d'un mélange


ki = équivalent saccharose de l'ingrédient I
ai = masse d'ingrédient I
Mo = masse d'eau dans la formulation
Mp = masse d'eau perdue lors de la cuisson

Tableau 10. Correspondance concentrations en équivalent saccharose activité de l'eau

Concentration en équivalent saccharose (en g saccharose/g d'eau)

aw

0,78

0,95

0,93

0,94

1,07

0,93

1,20

0,92

1,32

0,91

1,44

0,90

1,57

0,89

1,69

0,88

1,82

0,87

1,94

0,86

2,08

0,85

2,20

0,84

2,32

0,83

2,43

0,82

2,55

0,81

2,68

0,80

2,80

0,79

2,92

0,78

3,06

0,77

3,19

0,76

3,32

0,75

3,45

0,74

3,57

0,73

3,73

0,72

3,87

0,71

4,01

0,70

Tableau 11. Calcul et comparaison de l'au de deux formulations différentes de gâteau


Formulation 1

Formulation 2

Ingrédients

Poids

ES

Eau

Poids

ES

Eau

Farine

100

20

14

100

20

14

Gras

50

-

-

50

-

-

Sucre

60

60

-

90

90

-

Sel

1

11

-

2

22

-

Poudre à pâte

2

6

-

2

6

-

Lait en poudre

5

6

-

5

6

-

Glycerol

3

12

-

7

28

-

Oeuf

60

-

45

60

-

45

Eau

45

-

45

40

-

45


326

115

104

356

172

104

Perte en eau à la cuisson 10%

-10,4

-10,4

Eau après cuisson

93,6

93,6








0,91

0,87

Figures

Figure 1. Définition de l'activité de l'eau


P = pression partielle de la vapeur d'eau dans l'aliment
Pe = pression de vapeur de l'eau pure à la même température
HRE = humidité relative d'équilibre en %
aw = activité de l'eau

Labuza, T.F.; Tannenbaum, S.R. et Karel, M. 1970. Water content and stability of low moisture and intermediate moisture foods. Food Technology, Vol. 24, 543.


Figure 2. Relation entre l'activité de l'eau et l'humidité relative de l'air


Figure 3. Isotherme de sorption d'un aliment


Figure 4. Illustration de l'hystérésis dans une courbe de sorption


Figure 5. Modèle BET et représentation graphique


Figure 6. Isotherme de sorption du sucre cristallisé et du sucre amorphe


Figure 7. Effet d'une légère augmentation de la teneur en eau sur un produit déshydraté présentant un isotherme de sorption à hystérésis


Figure 8. Effet d'une variation de la température sur l'isotherme d'absorption de l'eau


Figure 9. Vitesse de détérioration relative des aliments en fonction de l'activité de l'eau


Figure 10. Principe de déshydratation par osmose


Figure 11. Appareil utilisé pour mesurer l'activité de l'eau